En février dernier, le Collectif Unitaire Montreuillois pour une Alternative de Gauche prenait l'excellente initiative d'interpeller les responsables politiques des différentes listes se présentant aux élections municipales sur les questions du prix et de la gestion de l'eau.

J'ai déjà publié une note sur cette initiative, avec la lettre du Collectif et ma propre réponse, rédigée à l'époque en tant que Président du groupe des élus socialistes et candidat sur la liste d'union... J'y exprimais mon accord avec la perspective d'un retour en régie publique de la gestion du service de l'eau potable à Montreuil et en Ile de France, mon investissement concret sur cette question (en tant qu'élu, mais aussi en tant que responsable de l'association nationale EAU), et enfin j'y exposais une méthode pour parvenir à construire un rapport de force capable de faire concrètement avancer ce retour en régie au sein du SEDIF.

Pour lire cet échange, cliquez ici.

Mais je n'ai pas été le seul à réagir au courrier du collectif, et toutes les listes de gauche, tous les responsables d'organisations qui forment cette gauche montreuilloise ont également répondu. La période électorale étant terminée dans les conditions que l'on connaît, je crois utile de publier ces réponses qui valent engagement.

Au delà du caractère polémique de certaines formules (lié à l'ambiance de la campagne électorale) et en dépit des nuances de forme et de fond qui existent, il faut noter la convergence générale sur cette question fondamentale, qui offre un réel point d'appui pour la suite.

Toujours très investi dans l'association nationale EAU, je tâcherai d'apporter ma contribution à cette bataille.



Réponse de Jean-Pierre Brard

Au nom de la liste Montreuil en plein élan


Montreuil, le 3 mars 2008

Monsieur,

J'ai bien reçu votre e-mail du 19 février dernier où vous m'interrogez, au nom du Collectif Unitaire Montreuillois pour une Alternative de Gauche, sur l'avenir du service public de l'eau à Montreuil. Je l'ai lu avec beaucoup d'attention.

Je tiens tout d'abord à souligner mon attachement au service public « à la française ». En qualité de vice-président du SEDIF (Syndicat des Eaux d'Ile-de-France), je suis particulièrement sensible à la question du service public de l'eau, dont les multiples dimensions - économiques, sociales, environnementales, sanitaires - ne sauraient être prises en compteque par la seule logiquedu privé. Il s'agit d'un service public vital, dont la qualité, la continuité et la sécurité sont des enjeux majeurs pour la solidarité et la santé publique.

Je partage votre opinion concernant l'échéance de la fin du contrat de « régie intéressée » avec Veolia en 2010. Elle doit être l'occasion d'un débat public de qualité, approfondi et transparent, sur le meilleur mode de gestion possible du service public de l'eau en Ile-de-France. Il s'agit pour le SEDIF de choisir le mode de gestion le plus pertinent (concession ou régie directe) et, en cas de concession, de sélectionner le (ou les) régisseurs(s) le(s) plus performant(s).

Je crois que, par égard pour nos concitoyens, nous ne pouvons pas nous prononcer a priori, sans avoir accompli ce travail, sur le meilleur mode de gestion de l'eau. Nous ne devons nous prononcer qu'au terme d'un débat public et d'une analyse fine et objective de la réalité complexe de l'exploitation de l'eau en Ile-de-France aujourd'hui et des différentes options de gestion pour le futur. Les seuls critères qui doivent nous guider dans ce choix sont : le prix de l'eau, notamment pour les consommations collectives (logements sociaux); la couverture complète du territoire ; la parfaite sécurité et continuité de l'alimentation en eau ; le respect voire l'anticipation des normes sanitaires; la qualité et le goût de l'eau ; le respect accru de l'environnement ; la veille technologique pour anticiper les innovations du secteur; la totale transparence financière et organisationnelle du gestionnaire ; la qualité de la relation aux usagers (facturation, infonnation, intervention en cas de problème...) ; le travail de pédagogie sur les enjeux de l'eau et de l'environnement; la coopération internationale renforcée autour des enjeux de la solidarité et de l'eau.

Il est évident que des progrès significatifs peuvent être accomplis par rapport à la gestion actuelle par Veolia, notamment concernant la rémunération du régisseur et le prix de l'eau. il ne faut cependant pas prendre pour argent comptant toutes les affirmations de l'enquête du magazine UFC-Que Choisir car cette enquête comporte de nombreuses approximations, ainsi que l'équipe d'UFC-Que Choisir en a d'ailleurs convenu lors d'une rencontre qui s'est tenue avec le bureau du SEDIF le 5 février 2008. Nous nous sommes d'ailleurs entendus avec nos interlocuteurs d'UFC-Que Choisir pour poursuivre le travail en commun.

Dans la perspective des discussions pour la décision quant au mode de gestion du SEDIF en 2010, les délégués des communes de gauche au SEDIF se sont réunis au sein de l'association « Une eau pour tous - Objectif 2010 » à mon inibative et à celle des autres vice-présidents de gauche du SEDIF (Daniel DAVISSE, maire communiste de Choisy-Le-Roi, Jacques MAHEAS, sénateur-maire socialiste de Neuilly-sur-Marne et Pascal POPELIN, adjoint au maire socialiste de Livry-Galgan). L'union des élus de gauche au SEDIF a déjà permis d'obtenir par le passé des baisses significatives du prix de l'eau, comme en 1998 où nous avions bataillé jusqu'à dimmuer de 50 centimes de francs le prix du m3. De même, c'est nous qui avons œuvré pour obtenir, à l'occasion de chaque avenant la baisse de la rémunération du délégataire en % des ventes aux abonnés. Elle est ainsi passée de 13 % à 12 % lors de l'avenant de 2002 et de 12,1 % à 11,4 % lors de l'avenant 2005. Nous ne sommes donc pas restés inactifs.

Par ailleurs,je ne vous suivrai pas dans votre affirmation concernant "le mauvais l'état  du réseau". La qualité de l'entretien et du renouvellement du réseau d'eau du SEDIF n'est pas contestable. La modernité et les marges de sécurité des installations sont si élevées que UFC-Que Choisir a même dénoncé les « surcapacités » du réseau. Cette critique qui renvoie implicitement à l'idée de flux tendu, notion que ne je fais pas mienne. Il est vrai que pour éviter toute pénurie d'eau en cas de sécheresse, accident dans une usine, pollution accidentelle de l'eau..., le SEDIF a prévu des réservoirs, le doublement de certaines canalisations stratégiques et des interconnexions entre ses réseaux. Ces précautions semble justifiées s'agissant de sécurité alimentaire et de santé publique. La qualité du réseau est d'ailleurs démontrée par les 350 000 analyses d'eau effectuées chaque année, qui témoignent d'une qualité sanitaire irréprochable de l'eau.

Je crois personnellement que, plutôt que sur la qualité du réseau, il serait plus pertinent de se battre, lors de l'échéance de 2010, pour obtenir la gratuité des premiers m3 d'eau. Voilà une mesure, pour les plus modestes, qui assurerait enfin un véritable « droit d'accès universel à l'eau » permettant la satisfaction des besoins élémentaires de chaque personne. J'ai défendu cette réforme à l'Assemblée nationale le 9 janvier 2002 par un amendement à l'article 31 du projet de loi de Mme Dominique Voynet portant réforme de la politique de l'eau. Je regrette que cet amendement ait été rejeté. Enfin, dans la mesure où l'eau est un bien vital, je me suis prononcé à plusieurs reprises en faveur de la nationalisation des grands distributeurs d'eau. Au même titre que l'électricité, le gaz ou les télécommunications,le service de l'eau nécessite d'être assuré par des entreprises publiques.

Je vous prie de croire, monsieur, à l'assurance de mes sincères salutations.

Jean-Pierre Brard


Réponses de :

- Dominique Voynet
- Parti Communiste Français
- Groupe des élus socialistes
- Ligue Communiste Révolutionnaire
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